Chiang Mai, 23 novembre 2004
 

Oups...

Eh bien ca y'est, nous sommes passés en Thailande. Mais pas de la façon dont nous le voulions : nous avons dû prendre l'avion...
Les iles Andaman étaient un cul-de-sac. La Thailande n'était pas loin, pourtant : 500 km à peine.
C'était un pari dans le pari que de tenter cette voie là pour continuer notre voyage. La seule voie enviseageable, avec le Tibet. Mais pour ce dernier, le temps et l'équipement manquaient.
A Port-Blair, nous avons couru les trois jetées de la ville :
La jetée de Phoenix Bay ne comporte que les gros transporteurs de la SCI, la compagnie nationale indienne.
Nous trouvons celle d'Aberdeen vide de bateaux.
C'est assez fébriles que nous allons explorer la dernière jetée : Junglighat. Dans la rue vivante et animée qui y mène se cache un peu de l'âme de Port-Blair. Devant des cabanes de bois et de tôle, le long d'une allée en terre qu'une intense averse vient de transformer en ruisseau, on prépare et on vend les poissons de la pêche du jour; les fruits splendides fraichement ceuillis et ramenés des iles avoisinantes s'amoncèlent.

Junglighat est le port de pêche de Port-Blair. Au bout de l'unique ponton sont amarrés quelques navires. Une grande barque décharge sa cargaison de bananes, vertes et sur leur branche encore, qui est immédiatement transbordée dans des camions.
Quelque part dans la baie, une radio hurle un tube local dont l'écho envahit la rive. Sur le ponton, les équipages déambulent, boivent le chay (thé, préparé avec du lait et du sucre), discutent.
Nous sommes un peu intimidés. Nous avisons un vieux chalutier thailandais à la coque en bois éclatante de couleurs vives, au pont tendu de hamacs. Ils doivent être une vingtaine à bord, à peine 20 ans pour la plupart. Ils nous considèrent avec un mélange d'amusement et de curiosité. Leur capitaine, une quarantaine d'années, placide et moustachu, ne parle pas Anglais. Nous tentons de lui expliquer que nous cherchons à embarquer pour la Thailande, que nous payons notre passage (plutôt bien, d'ailleurs), voulons savoir quand il part. Peine perdue : il nous fait comprendre que le navire est coinçé là, sans autorisation de débarquer, ni de repartir...
Curieux bateau, et curieux équipage... vers quels espoirs, ou plutôt vers quelles nécessités allait-il ?
Après plusieurs autres essais, nous quittons finalement la jetée, bredouilles.

Dernier espoir : trouver un intermédiaire qui nous mette en contact avec les bateaux privés, plaisanciers ou marchands, susceptibles de nous prendre.
Mais les Andamans ont un régime particulier : aucun bateau ne peut les quitter sans une autorisation spéciale et longue à obtenir. "Nobody will do that for you", nous prévient-on...
En effet... nos gesticulations parviennent juste à rabattre vers nous quelques offres de traversées, floues et probablement clandestines, que nous refusons.
Nous sommes coinçés. Il nous faut nous résigner : ce sera l'avion. Port-Blair / Calcutta, puis Calcutta / Bangkok.

Quand ce projet est né, il y a bientôt deux ans, l'avion en était d'emblée exclu. Nous n'avons pas cessé depuis de tenter de nous tenir à cette unique règle, que nous pensions naïvement simple.
Ce n'est pas que nous n'aimons pas l'avion. Mais en avion, on ne voyage pas : on se déplace.
Nous mettons, entre Port-Blair et Calcutta, deux heures à faire le chemin que nous avions mis quatre jours à parcourir en bateau. Cette traversée là était longue, usante, mais au moins, c'était de la vie... nous les avons rêvées, les Andaman !
Et quand finalement elles sont sorties de l'horizon, entre deux rideaux de pluie, le sentiment que nous avons éprouvé était bien plus fort que ce que nous inspire la vision de Calcutta qui apparait déjà au travers du hublot, figée et glacée comme une photographie.

Nous passons cette nuit là à Calcutta. Nous regrettons de ne pas avoir plus de temps à lui consacrer, tant la ville nous secoue d'emblée : elle vibre avec autant d'intensité que Bombay, mais d'une autre couleur, d'une autre animation.
La foule est tout aussi bigarée, on doit marcher sur la route tant les trottoires sont surchargés d'étals où l'on vend pêle-mêle épices, thé, poules, pièces de scooters, fruits, poissons... L'air est saturé du bruit des klaxons et des odeurs les plus variées : de celle de l'ordure et de la charogne à celle des encens les plus délicats.
On appelle Calcutta "la cité de la joie". Je ne sais pas pour la joie, mais la bouffée à la fois brute et âpre de vie que nous y prennons lors de cette trop courte escale nous laisse pentelants, quand le lendemain un nouvel avion nous enlève pour Bangkok.

La Thaïlande est arrivée sans prévenir. Auparavant, nous avions senti chaque pays venir bien avant d'en avoir franchi la frontière : nous pouvions doucement sentir changer les paysages, les visages, les costumes et les coutumes, annonçant la nouvelle étape.
Pas cette fois, avion oblige... du coup, nous prenons en plein visage le décalage immense qui sépare l'Inde de la Thaïlande. C'est une claque comme nous aimons en recevoir parce que celles-çi sollicitent chaque sens, accaparent l'esprit qui essaye d'appréhender les mille changements qui lui sont offerts.
Tout à changé. Oublié le chaos qui semble anéantir tout effort d'organisation en Inde. Ici, tout est carré et précis. Et même une question simple appelle une réponse précise. Nous en pleurerions...
Disparues des routes, les vaches, les chèvres et les chiens.
Envolées, les femmes en sari superbes.
Dispersée, l'épaisse fumée des rickshaws qui flotte sur les villes comme une mauvaise brume. Et nos klaxons, nos tas d'ordures, et mes poulets tandoori...
La Thaïlande, du moins dans les endroits que nous traversons, vit au rythme occidental. Tout est propre, organisé, presque asseptisé.
Tout ici, et surement un peu trop, est amenagé pour le confort du touriste occidental qui ne s'y trompe pas et vient en rangs serrés.

Nous quittons Bangkok le jour même, dimanche 21. Notre train de nuit n'a pour passagers que des "backpackers" (littéralement celui qui porte un sac à dos : nous, en somme). Nous arrivons au matin à destination : Chiang-Maï.
Cette grande ville du nord de la Thaïlande a pour nous deux avantages : elle est proche de la frontière laotienne, et elle comprend un centre de dressage d'éléphants. Nous les avions ratés en Inde, nous ne pouvions pas les laisser passer ici... Quels Phileas Fogg et Passepartout ferions nous, sinon ?

Nous partons demain matin pour le Laos. Après une période lente et poussive en Inde, nous nous apprêtons à renouer avec l'urgence et la vitesse pour rattraper le retard que nous avons pris. Prochaine étape : Hong-Kong, à 2500 km d'ici.

   
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plage haute en couleurs, Port Blair
   
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Rickshaw de Calcutta
   
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Téméraire traversée, Calcutta
   
 
Au fond d un jardin, Chiang Mai
   
 
Gare aux éléphants dans la region, Chiang Mai
   
 
Boudha, Chiang Mai
   
 
Temple en fete, Chiang Mai
   
 
Une statue et le temps...
   
Bonzs étudiants
   
 
On enlève ses chaussures à l'entrée d'un temple...
 
     
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